Une entame idéale !
Les 53 équipages en lice dans la 9e édition des Voiles de Saint-Barth Richard Mille sont entrés dans le vif du sujet, ce lundi.
Profitant d’un régime d’alizé soufflant entre 15 et 20 nœuds, ils ont effectué une première course pour le moins tactique sur le côté ouest de l’île (une boucle de 22 milles pour les CSA 1, 2 et 3 puis un parcours de 28 milles pour les Maxi 1, Maxi 2, OMA et CSA Multihull). Si le premier louvoyage jusqu’à Saline s’est révélé relativement déterminant pour le reste de la course, les équipages ont toutefois dû faire preuve de concentration et de rapidité d’adaptation pour rester dans le match jusqu’à la fin. A ce petit jeu, certains ont évidemment mieux tiré leur épingle que d’autres mais l’action a bel et bien été au rendez-vous à tous les étages.
La météo s’annonçait favorable pour cette première journée de compétition, avec entre 14 et 18 nœuds de prévu. Elle a tenu toutes ses promesses avec un alizé bien établi à près de 20 nœuds, offrant ainsi aux 53 équipage en lice une première journée de compétition quasi idéale. « Difficile d’espérer mieux pour une entrée en matière », a commenté Olivier Douillard, tacticien à bord d’Aragon, deuxième, ce lundi, chez les Maxi 2, derrière Windfall de l’Irlandais Michael Cotter. « Il est plus lourd que nous et donc plus à l’aise dans le vent soutenu. Ces deux dernières années, nous avions profité de conditions un peu plus faibles pour exploiter parfaitement le potentiel de notre bateau, mais cette année, cela risque d’être un peu plus compliqué pour nous d’arriver à lui titiller les moustaches », a ajouté le navigateur Nantais, habitué des Voiles de Saint-Barth puisqu’il y vient pour la cinquième fois avec son équipage, talonnant ainsi de près George David, le propriétaire de Rambler 88, fidèle parmi les fidèles au rendez-vous avec un total de sept participations et pas moins de quatre victoires.
Les Maxi 72 et JV 72 aux avant-postes
L’Américain parviendra-t-il a en accrocher une cinquième cette année chez les Maxi 1 ? Rien n’est moins sûr car handicapé par son fort rating, il risque de se laisser voler la vedette par Proteus de George Sakellaris (le tenant du titre dans cette catégorie) et Sorcha de Peter Harrisson. Cela a d’ailleurs été le cas aujourd’hui puisque les deux 72 pieds occupent ce soir les première et deuxième place au classement provisoire. « Nous nous sommes livrés à une incroyable bataille. Un duel digne de match-racing du début à la fin ! Ça a été un coup à lui, un coup à nous. Nous sommes très contents d’avoir remporté la mise cette fois surtout que nous avons connu des premiers milles un peu difficiles car Rambler 88 nous tombait dessus. Heureusement, nous avons réussi à nous faufiler et à échapper à son dévent », a noté George Sakellaris à son retour à terre, un peu déçu de constater le retrait de la course de La Bête d’Yves Montanari en raison de la casse de son bout dehors survenu lors de son convoyage entre Antigua et Saint-Barth, ainsi que celui d’Althane (Maxi 2) à la suite de la délamination de son tableau arrière provoquée par un violent choc contre le quai au moment de rejoindre la zone de départ.
Limiter les erreurs et compenser son rating
Chez les plus petites unités, la bagarre a été intense également. Chez les CSA 1 notamment, les parieurs auraient assurément eu bien du mal à pronostiquer l’ordre d’arrivée. Au final, ce sont les Porto Ricains de Lazy Dog (déjà plusieurs fois vainqueurs de la course) qui se sont installés sur le fauteuil de leader devant Albator, le NMD43 de Philippe Frantz récent vainqueur de la RORC Caribbean 600 en IRC 1 qui signe, cette année, sa première participation aux Voiles de Saint-Barth, à l’image de l’équipage de Conviction, mené par Steve Travis. Vainqueur en temps réel ce 9 avril, ce dernier, lourdement pénalisé par le rating de son TP52, se trouve relégué en 7e position à l’issue de cette première manche. « Il va falloir ne faire aucune erreur et finir avec une avance considérable pour espérer gagner », a indiqué Frédéric Laffitte, le régleur de grand-voile du bateau américain. « Aujourd’hui, nous avons perdu du temps à cause d’un problème de voile. Notre génois a, en effet, explosé sur la fin du premier bord du près, juste avant le passage de marque. Le reste s’est bien enchaîné pour nous mais manifestement pas suffisamment », a regretté le Français jusqu’alors plus habitué à régater en Méditerranée en voile classique.
« Un régal »
Chez les Multicoques, là encore, le jeu des ratings a créé quelques surprises. En CSA Multihull, si le Multi50 French Tech Caraïbos mené par Gilles Lamiré (vainqueur de The Transat bakerly 2016) a fait parler toute la puissance de sa machine, terminant ainsi avec une belle avance en temps réel mais seulement 5e dans sa catégorie en temps compensé. « Peu importe, régater dans les eaux turquoises de Saint-Barth aujourd’hui a été un vrai régal », a commenté le Cancalais qui laisse donc la première place à Christian Guyader, le skipper de Guyader Gastronomie qu’il retrouvera en novembre prochain sur la Route du Rhum – Destination Guadeloupe. « On a pris un très mauvais départ, sans doute l’un des plus mauvais qu’on ait jamais pris. Au près, on a un peu souffert mais on s’est accroché à notre objectif de finir en temps réel avec les gros bateaux, en l’occurrence les HH66 (Nala et Jim Vos puis Flash de David Welch qui courent dans la classe des OMA, ndlr). Au portant, nous avons réussi à revenir sur eux et même à les doubler. C’était sympa d’autant que nous avons réalisé quelques pointes de vitesse à plus de 20 nœuds, y compris sous génois », a expliqué le chef d’entreprise breton, visiblement ravi, comme l’ensemble de ses concurrents, de cette première journée de course et d’ores et déjà impatient d’attaquer la deuxième demain, à partir de 10 heures.
Ils ont dit :
Gilles Lamiré, skipper de French Tech Caraïbos (CSA Multihull) : « On termine premier en temps réel mais en temps compensé, on ne sait pas trop comment on se situe. Ce dont on est sûr, en revanche, c’est que le bateau marche très bien, notamment au près. Les conditions ont vraiment été super aujourd’hui. Cela nous a permis à l’équipage de prendre ses marques car nous n’avons pas tous l’habitude de naviguer ensemble. Nous avons fait quelques erreurs, forcément, mais globalement, nous avons bien régaté et nous allons nous améliorer au fur et à mesure. C’est vraiment un régal de naviguer au milieu de tous ces Maxi et ces Gunboat. Courir à Saint-Barth est vraiment quelque chose de magique. »
Philippe Frantz, skipper d’Albator (CSA 1) : « Cette première course a été une très belle régate. Le premier bord de près a été très important mais ça s’est toutefois bien bagarré jusqu’au bout. C’est notre première participation aux Voiles de Saint-Barth. Nous avons décidé, cette année, de faire une saison aux Antilles. Nous avons donc déjà participé à la RORC Caribbean 600 que nous avons gagnée le mois dernier dans notre classe. C’est avec plaisir que nous sommes venus à Saint-Barth et nous sommes ravis des conditions dont nous allons profiter cette semaine. Aujourd’hui, c’était vraiment sympa. Nous avons fait quelques bêtises mais rien de grave. Nous sommes notamment arrivés un peu tard sur la ligne de départ et de ce fait, nous sommes partis en deuxième rideau. Heureusement, nous nous sommes bien rattrapés ensuite puisque nous avons passé la première marque en deuxième position. En temps réel nous sommes très bien placés. Reste à voir ce que ça donne en temps compensé ».
Soumaya Verder, co-propriétaire d’Aragon (Maxi 2) : « Ça a été une très belle journée. On a bien navigué même si notre départ n’a pas été aussi réussi que ce qu’on espérait en partant du côté du bateau comité. A bord du bateau, nous sommes deux familles, quelques copains et quelques pros. C’est la cinquième fois que l’on vient aux Voiles de Saint-Barth et, une nouvelle fois, c’est avec nos enfants, même si c’est la première fois qu’ils sont aussi peu (deux sur sept, ndlr). Ça fait toujours du bien de venir à Saint-Barth. C’est le meilleur endroit pour naviguer. Il fait beau et il y a toujours du vent. Cette année, on avait une raison de participer à la course. En effet, après Irma, on s’est dit qu’on ne pouvait pas ne pas venir. »
Éric Dumont, équipier de Liquid (CSA 2) : « Le départ avec trois classes en même temps, ce n’est pas si simple et il faut être très concentré. On a réussi à bien s’en sortir malgré tout. Ça s’est beaucoup joué sur le premier louvoyage jusqu’à Saline qui s’est révélé très tactique, la faute à d’importantes bascules de vent (jusqu’à 30°). Comme c’est un parcours que je connais bien, on a bien joué à terre. Je pense qu’on fait bien car on finit juste derrière les gros bateaux et on a réussi à faire un trou derrière nous. On a fait toute la régate sans personne pour nous gêner. On est assez content de notre première journée. »
Quentin Blondiau, régleur de grand-voile à bord Samatanga (CSA 1) : « On est bien parti mais on a ensuite cumulé les soucis. Quelques bricoles ont lâché sur le bateau. On a notamment rencontré des problèmes avec le pataras et le tangon. Cela nous a un peu handicapé car nous nous sommes concentrés pour réparer au lieu de nous concentrer sur la course proprement dite car nous avons mis du temps à trouver les solutions. Nous ferons à coup sûr mieux demain mais en attendant, nous avons un peu de boulot à faire sur le bateau. »